Mark Millar est un auteur de comic books écossais, connu pour sa tendance à en faire trop. Et même quand il en fait trop, il trouve le moyen d’en faire encore davantage dans l’épisode suivant. Pour vous donner une idée, si Warren Ellis était Monsieur Plus, Mark Millar serait Monsieur Trop.
Âgé aujourd’hui de 38 ans (il est né le 24 décembre 1969… sacré cadeau de Noël à un monde qui n’en attendait pas tant), Mark Millar a quasiment tout vu, tout connu dans l’univers des comics américains. Il a repris la série The Authority de Warren Ellis pour l’amener à des sommets. Il a posé sa patte sur les séries les plus fameuses de l’univers Marvel (Ultimate X-Men, the Ultimates, Wolverine, Ultimate Fantastic Four, Wolverine, Civil War…). Il a transformé Clark Kent en super-prolétaire stakhanoviste dans Superman: Red Son. La légende dit qu’il écrivait les JLA de Morrison à la place de ce dernier. Il a éradiqué tous les super-héros de la planète dans Wanted. Bref, Mark Millar n’a pas chômé.
Ma découverte de Millar date donc de The Authority #13. Dans cet épisode, il relève le flambeau de la série la plus « dans ta face » de l’univers Wildstorm (un univers parallèle du multivers DC Comics, depuis son rachat à Jim Lee en 1998). Il commence son travail sur la série en nous posant une question : pourquoi les super-héros préfèrent-ils later la gueule des super-vilains en costume moulant plutôt que d’avoiner la tronche des dictateurs suprêmes qui exploitent telle ou telle partie du monde ?
Notons au passage que Millar renverse la question dans sa mini-série Wanted : pourquoi les méchants laissent-ils les héros en vie, alors qu’il suffit de les tuer une bonne fois pour toute pour que le crime finisse par payer ?
Bon, donc, The Authority décide que ça va changer : ils vont se mêler des affaires du monde. Et pas qu’un peu. Et pas juste contre des petits truands. Et ça va leur monter à la tête. Genre, imaginez une équipe avec Michael Jackson, Prince, Madonna, Britney Spears, David Bowie et… euh, Elvis. Sauf qu’au lieu d’être le groupe de chanteurs le plus populaire de la galaxie, c’est l’équipe de super-héros la plus balaise de toute l’histoire. Mais ça reste des vedettes, quand même. Avec tout ce qui va avec (Millar ira encore plus loin sur le thème du vedettariat avec son traitement des héros dans le Youngblood de Rob Liefeld).
Au bout d’un moment, le gouvernement américain (qui se doute que ça va finir par lui tomber sur la gueule à son tour), déclenche l’apocalypse sur la tête de nos héros. Une équipe parodiant les Vengeurs s’en prend à The Authority dans un combat aussi titanesque que délirant. Les scènes cultes et gore à la fois ne manquent pas. Et surtout, on découvre un des sujets que Millar aime bien distiller dans ses histoires : la métacommunication autour de sa propre écriture. En effet, un personnage central de cette saga est directement inspiré d’un des plus grands créateurs de comics de tous les temps : Jack Kirby.
Si la violence de Millar vous interpelle, je vous recommande la lecture d’un passionnant dossier sur la censure dans The Authority par Julian Darius. En effet, la période post-11 septembre a vu The Authority subir une censure significative, reflétant les tensions et les préoccupations de l’époque. Millar, avec son penchant pour la controverse, s’est retrouvé au cœur de ces débats, montrant une fois de plus que son travail ne se contentait pas de divertir, mais aussi de provoquer et de remettre en question.