La dernière fois, je vous avais promis quelques compléments pour illustrer les propos de l’ami Jérôme, notamment à propos du placement des bulles et des cases. Séchez vos larmes, votre patience va enfin être récompensée ! Je rends immédiatement la parole à Jéjé qui vous expliquera mieux que moi cette affaire d’encombrement textuel…
Jéjé, à toi la parole !
Jérôme Wicky : Dans la case 4, Iga jacte comme une pie. En même temps, on était un peu obligés, il expliquait la fonction du bazar cosmique, un des éléments fondateurs de la série. N’empêche que Gonzalez se retrouve avec un gros texte et une case complexe qui décrit le bazar cosmique. Donc il doit jongler avec le placement des bulles et des cases. Au final, on a un bout de scène que beaucoup de lecteurs, dont moi à la lecture des premiers tirages coloriés et lettrés, ont trouvé un peu confuse : on finit bien par comprendre qu’il faut lire les cases en zig-zag, mais ce n’est pas évident à la première vision.
L’autre truc, c’est l’apparition des deux robots en bas de page : c’est un des « rebondissements » à la Van Hamme que j’évoquais.
Et pourquoi vous n’avez pas mis des flèches pour indiquer le sens de lecture des cases ? Je me souviens qu’ils faisaient ça dans Mickey, quand j’étais petit, pour expliciter le placement des bulles et des cases.
Jérôme Wicky : Moi j’aurais voté pour les flèches. Mais je crois sincèrement que le texte, ici, était exceptionnellement gros et qu’il a fait ce qu’il a pu pour ne pas le placer au détriment de l’image. Donc, depuis, j’essaie d’être prudent avec les gros textes, je les réserve à des cases où il n’y a pas cinquante trucs, où il n’y a pas de « premier plan/second plan », pour une simple question de place.
Tiens, voilà un truc que je suis aussi en train d’apprendre : adapter mon scénario au dessinateur, à ses forces et à ses « faiblesses » (c’est un bien grand mot vu le pro qu’est Gonzalez). Mais ça, c’est aussi dû au système dans lequel on travaille : Jim et moi, on livre notre scénar, JLC le regarde et nous dit s’il y a des choses à modifier, et ensuite ça part en Espagne, chez Gonzalez. On n’a pas de contacts directs avec lui donc il faut essayer de bétonner le scénar, que tout soit ultra-clair et essayer de repérer et d’aplanir certaines difficultés.
Normalement, on voit le dessin au stade des crayonnés (pas toujours) et s’il y a des merdes, on peut les corriger à ce moment-là, mais tant qu’à faire j’aime mieux éviter d’avoir à demander au dessinateur de refaire une case entière, par exemple. Donc j’essaie que ce soit nickel dès le stade de l’écriture.
La taille des textes, en fait, c’est une de nos principales sources d’engueulade avec Jim. En gros, je fais toujours les dialogues, mais quand le synopsis original est de Jim, il insiste parfois pour ajouter des trucs qui lui tiennent à cœur (c’est souvent du techno-babble), et parfois je fais la grimace, parce que j’ai peur qu’on se retrouve avec des bulles pas super bien positionnées. Mais en général, tout finit bien.
Voilà. Tout est bien qui finit bien : merci Jérôme Wicky !
En effet, notre ami bédéaste a raison : le placement des bulles et des cases est au cœur de la création d’une bande dessinée réussie. C’est un véritable art qui nécessite un équilibre délicat entre le texte et l’illustration. Les bulles doivent être positionnées de manière à guider l’œil du lecteur à travers l’histoire, tout en laissant assez d’espace pour que le dessin puisse respirer et s’exprimer. Les cases, quant à elles, doivent être disposées de manière à créer un rythme visuel qui soutient le récit. Une bande dessinée bien conçue utilise le placement des bulles et des cases pour créer une expérience de lecture fluide et engageante, comme c’est le cas, n’en doutons pas, dans Mickey à travers les mondes !