J’ai lu le numéro hors série du Monde Diplomatique en bande dessinée. Il s’agit d’une initiative originale à saluer et à souligner de la part de ce journal brillant. À vrai dire, c’est sans doute le seul magazine d’information qu’il m’arrive encore d’acheter de temps en temps. C’est dire le crédit que je lui accorde.
La couverture présente un Tintin vieillissant, perdu au milieu de fétiches et autres jouets désuets. Par la fenêtre, on aperçoit son boy en train de jardiner. Bordel, où est le mien, de boy, quand il faut tondre la pelouse, hein ?
En intro, David Vandermeulen annonce qu’à l’avenir, tous les numéros du magazine seront présentés sous forme de BD. Déconnade et fausse bonne idée : en vérité, sur la douzaine d’histoires courtes présentées pour l’occasion, seule une petite quantité utilise convenablement la narration BD pour transmettre des idées. D’ordinaire si limpide, le journal est beaucoup plus ardu à lire sous forme d’art séquentiel que sous son habituelle construction textuelle.
Certes, chacune des BD publiées a certainement son intérêt mais je ne suis pas convaincu que le journal ait gagné des lecteurs dans cette opération. Ni que la cause de la BD soit grandie par l’expérience. On sait pourtant que la bande dessinée est un formidable vecteur de communication pour ce genre d’articles : L’Affaire des Affaires l’a prouvé, en expliquant le dessous de l’affaire Clearstream de manière limpide.
Pour moins de dix euros, achetez le magazine. Vous jugerez par vous-mêmes. Pour ma part, je crois que je préfère encore écouter les interventions de Frédéric Lordon à la radio ou encore lire ses bouquins. La BD qu’a tirée Jochen Gerner des travaux du monsieur est très jolie mais, bien que familier du discours qu’elle présente, je n’ai rien compris.
Initiative intéressante, donc. Intéressante parce qu’elle vise surtout un lectorat qui ne lit pas de BD et à qui on donne à lire des BD réalisées pour l’essentiel par des gens qui ne lisent pas de BD non plus (j’ai dit « pour l’essentiel » car il y en a qui maîtrisent visiblement le langage du neuvième art, malgré tout). Bref, le Diplo nous sert un Canada Dry alors qu’on attendait un pur malt. Dommage. On n’est pas passé loin d’une vraie réussite. Vivement le prochain essai !