Depuis la fin de l’année dernière, je me suis lancé dans un nouveau type d’exercice : le gag en une page. Au début, c’était pas évident. Mais il fallait bien que la BD « Banc de touche » soit prête avant la Coupe du Monde de Football donc j’ai dû apprendre à écrire des blagues.
Aujourd’hui, c’est toujours pas évident mais au moins, j’ai pu identifier certains procédés qui me permettent de gagner du temps. Et quand on doit écrire une planche par jour pour le strip « Banc de touche » dans le journal L’Équipe, mieux vaut avoir des techniques efficace (et des collègues doués). Car oui, le tome 2 de BDT est pré-publié dans L’Équipe à raison d’une planche BD chaque jour, réalisée en direct pendant le tournoi !
Comment gérer la difficulté de se renouveler quand on doit faire rire tous les jours ? Accumuler l’humour référencé apprécié des seuls connaisseurs est une facilité dont on pourrait se contenter si on ne visait que les footeux, pour suivre l’exemple de Banc de touche. Mais nous écrivons une bande dessinée tout public. Elle doit faire rire aussi bien l’amateur éclairé que sa petite sœur.
Pourquoi les gens rient-ils ? L’humour s’appuie sur deux piliers : la surprise et le sentiment de supériorité. Ça, je ne l’ai pas inventé, c’est Mel Helitzer qui le dit dans son excellent ouvrage « Comedy Writing Secrets » dont je vous reparlerai à l’occasion.
La surprise intervient au moment de la chute de l’histoire. Le rire permet un relâchement soudain de la tension accumulée depuis le début de la blague. D’ailleurs, vous l’avez remarqué lors des repas de famille, les meilleurs raconteurs de blague ne sont pas ceux qui en connaissent le plus. Pour rendre une blague efficace, il faut faire monter la pression, maintenir la tension au plus haut niveau possible, puis, d’un coup sec, relâcher toute cette pression d’un bloc. Résultat = LOL.
Une planche de BD d’humour, c’est un peu ça : on échafaude un plan pendant 7 ou 8 cases et une fois que le peintre est tout en haut du mur, on enlève l’échelle.
Il y a plusieurs manières de provoquer le rire après avoir fait monter la sauce. Parfois, uen chute insensée est très drôle. L’incongruité d’une situation déclenche l’hilarité par son humour absurde.
On rit aussi pour se défendre, pour se protéger. La meilleure défense, c’est l’attaque. Quand on se moque de quelqu’un, c’est qu’on l’attaque sur le terrain de la rigolade. Même si c’est parfois très, très méchant. Mais bon, on sait tous que les gentils ne gagnent pas toujours à la fin.
Se moquer, c’est une façon d’établir sa supériorité. D’asseoir son autorité en diminuant celle du pauvre malheureux dont on se moque. C’est un moyen de se rassurer sur sa propre valeur, de relativiser les choses. C’est un bon levier pour faire tomber un supérieur de son piédestal.
Pour toutes ces raisons, parodier l’univers de l’équipe de France de football permet à n’importe qui de s’amuser à peu de frais. J’aime beaucoup cette équipe. Et même son sélectionneur. Mais le fait est que nos chances d’aller en finale sont minces. Si minces que rire de la fébrilité des Bleus est peut-être le meilleur moyen de prendre du recul et d’éviter la déception en cas d’élimination.
Mais bon, à mon avis, ils accrocheront une deuxième étoile à leur maillot, cette année. Avant ça, j’aurai l’opportunité de revenir sur une question qu’on me pose souvent :
d’où viennent les idées pour écrire un gag ? En attendant, je vous invite à aller faire un tour sur le blog Banc de touche : http://bancdetouche.wordpress.com/